16 Juillet 2015
Elle s'appelait TOMOJI. A la croisée du manga et de la bande dessinée, le dernier album de Jiro Taniguchi dépeint un Japon rural des années 20, tout en mettant en scène la rencontre amoureuse entre deux adolescents.
Entre sobriété et sensibilité, l'auteur narre l'histoire de Tomoji Uchida, née en 1912, dans une famille rurale et prospère. Sa vie bascule lorsque son père décède, mais elle peut compter sur le soutien de son frère aîné ainsi que sur sa grand-mère. Malgré de nombreuses souffrances, la force de caractère de la jeune femme la pousse à continuer d'étudier, tout en travaillant dur pour faire vivre sa famille. C'est en croisant le destin de son cousin Fumiaki Ito que la jeune femme découvre le bonheur, en fondant son propre foyer, et quelques années plus tard...un temple, (le temple bouddhiste Shôjushin, situé non loin de Tokyo et à l'origine de cet album). Comme nous le livre l'auteur, à la fin de ce premier volume, sans une demande de la part de ceux qui animent ce lieu sacré, ce livre n'aurait jamais vu le jour! Taniguchi réussit avec brio à mettre en valeur la jeune femme, sans tomber dans un travail trop hagiographique.
Elle s'appelait Tomoji est avec les Années douces, une des oeuvres au travers desquelles l'auteur dévoile avec simplicité la naissance des sentiments amoureux, et s'attache avec force à un personnage féminin, et cela lui réussit.
Junker. "C'est ainsi que ça s'est passé. Enfin , plus ou moins, Quoique..."Simon SPRUYT ne trompe pas son lecteur : l'uchronie est à la base de son ouvrage.
Réinventant les prémices de la Première Guerre mondiale, l'auteur nous plonge dans une histoire familiale et captivante au coeur de la Prusse au début du XXe siècle. Il dépeint le destin de deux frères, Ludwig et Oswald von Schlitt, issus de la noblesse et qui, entre tradition et honneur, suivent les traces de leur père au sein de l'école des cadets. Mais Ludwig, le cadet, réservé, se détache de son frère et ne sa passionne que pour la mitrailleuse Maxim, jusqu'à ne rêver plus que d'elle et de commettre l'irréparable...Le danger vient toujours de là où on l'attend le moins!
comme dans une chanson bien écrite, le rythme de Junker est soutenu et les temps ne sont jamais morts. le choix des couleurs est harmonieux entre bleu (blues) de Prusse et noir et blanc, tout en mettant en valeur les membres de la famille von Schlitt ainsi que leurs proches, et prenant le soin d'uniformiser le visage des autres personnages, symbole de leur insignifiance. Entre folie guerrière, rêverie mélancolique, et fardeau de l'héritage, Simon Spruyt brille!
La Favorite. Au travers d'un dessin en noir et blanc à la carte à gratter qui se rapproche de la gravure, assez austère au premier abord, mais captivant par la suite, Matthias LEHMANN nous plonge dans le regard de Constance, petite fille (enfin presque...!) au regard acerbe mais juste.
"Enfant, le grenier de ma grand-mère me terrorisait." Dès la première phrase, l'auteur décrit la souffrance de Constance. Entre une grand-mère acariâtre et un grand-père préférant se noyer dans un bon verre de vin plutôt que d'affronter se tyrannique épouse, Constance, petit garçon contraint de se travestir en fille, tente d'échapper à une vie bourgeoise qui l'étouffe. Avec son meilleur et seul ami Noirette, un chat croisé aux détours des bosquets du jardin, Constance refait le monde au travers d'un imagination débordante. Le tableau familial artificiel peint par la revêche grand-mère semble tenir la route jusqu'au jour où un couple de Portugais, avec leurs enfants, s'installe dans la maison de l'ancien gardien...
Matthias Lehmann réussit superbement à déstabiliser son lecteur en installant une situation des plus glauques, entre psychanalyse et sadisme, pour mieux la détourner en utilisant le regard d'un enfant de 10 ans qui évolue et grandit au travers des réactions de son entourage. La tension est maintenue jusqu'au bout, et le dénouement en surprendra plus d'un.