2 Mai 2020
Il fallait bien ce grand format : 29 cm et 329 pages pour faire entrer la Révolution française dans une bande dessinée ambitieuse qui associe avec brio une connaissance rigoureuse , documentée...et complexe d'un événement capital de notre pays avec une narration haletante , un déroulé saccadé d'actions et un sens du cadrage, de l'image qui affole l'oeil du lecteur qui se perd (il faut le dire) dans une profusion de détails qui le met dans la peau de Fabrice Del Dongo , perdu au milieu de la bataille de Waterloo.
Pour faire court , les deux auteurs, Grouazel et Locard conjuguant fonds et forme rendent palpable, terriblement réaliste le maelstrom qui va s'abattre sur une ville : Paris, et agiter, bousculer puis faire s' envoler comme fétu de paille, la vie...et le destin d'une poignée de personnages : deux orphelines issue du petit peuple, deux frères jumeaux de la noblesse bretonne venus participer à la réunion des Etats Généraux , et un sombre libelliste mais surtout agent provocateur agissant à l'ombre des quartiers mal famés de la capitale pour le compte d'aristocrates inquiets pour leur ordre et leur privilèges.
Ce premier volet, étourdissant, ne "court" que la période allant d 'avril à septembre 1789 , ce qui suffit déjà à notre capacité de saisir les débuts de cette longue Révolution ! En nous plongeant littéralement au ras du sol ,pour nous relever parmi ces hommes et femmes sans cesse entraînés par ces mouvements de foules (très bien rendus dès les premières pages), cette bande dessinée explique aussi l'importance du milieu ( une ville qui respire de façon oppressée entre engorgement des octrois,, sol fangeux , rues étroites, façades trop rapprochées, et vagues sans cesse agitées des toitures biscornues que dominent des fumées d'incendies dans un ciel d'une pâleur morbide ) qui va influencer , orienter (?) le cours de plus en plus radical, violent de cette révolution faite avec des mots (et quels mots)mais aussi avec des élans, des émotions comme la joie la peur et la colère. Si Abel Gance n'avait pas eu à sa disposition le cinéma et si Hugo avait davantage pratiqué le dessin , sûr que ces deux là auraient signé sans vergogne cette bande dessinée.