Exposition "Les Racines du Regard" du 28 nov au 12 janv 2008 par Louis Beauvais
Un monde taillé à la mesure du rêve
Devant sa maison, les Forges, bordée d’arbres, les feuilles mortes s’amoncellent sur une herbe qu’il n’a plus le temps de tondre. Louis Beauvais est encore sur la route. De toute évidence, la saison automnale est propice aux déplacements de l’artiste, familier du pays de Brocéliande. Il y a peu, pour la Saint-Eloi il était devant l’enclume de l’atelier des Brieux (à Plélan-le -Grand) avec ses amis forgerons, et une de ses expositions vient-elle à peine de s’achever à Rennes qu’il part de nouveau, en Angleterre, en emportant dans « ses bagages »ses sculptures et ses rêves.
Cet homme du mouvement et de l’attachement nous offre avec les Racines d’un regard une vision spontanée du monde, ouverte à toute interprétation, taillée dans une matière symbolique : la pierre même du territoire qu’il habite.
« Pays du schiste rouge, pays du fer, pays embrumé de celtitude, toujours baigné de légendes, Brocéliande a de nombreux visages, à l’infini dépaysants.
Mes sculptures sont le reflet des influences de mes racines, de mes rêves. Elles portent mon imaginaire en unissant la roche pourpre ou au bronze.
Ces réalisations sont élaborées en taille directe, seule façon de respecter une roche si délicate ».
Cette technique de la taille directe laisse donc la part belle au risque et à l’inattendu. C’est le caillou qui décide (pour reprendre l’expression de Louis Beauvais), en fonction de sa fragilité et de ses failles.
Il en va de même pour la signification de cet ensemble de sculptures enclos symboliquement par une corde, au centre de la salle, et qui surgit à la surface d’une mince couche de riz. L’artiste invite le public de tout âge à venir s’asseoir face à ces apparitions minérales et métalliques .Il incite chacun à utiliser son regard (reflet parmi tant d’autres) comme il l’entend. Et librement, les similitudes, les rapprochements se dessinent, prennent consistance. Grâce au schiste et au granit tirés de ce sol de Bretagne, une connivence naturelle s’installe. Devant les pièces dressées, animales, humaines ou chimériques, figuratives ou abstraites, on s’invente son rituel personnel (spirituel ou matérialiste) pour oser l’échange avec elles. On les interroge. « Ces tableaux : écailles de dragon ou tôle d’un vieux camion ? ». « Et ce long bâton de fer, orné des pierres sanglantes, attribut d’un chef indien? ».
On finit par rejoindre le cercle du temps qui passe, sans se rendre compte qu’on vient de provoquer une turbulence, un tourbillon créatif, argenté comme la trace d’un avion dans le ciel.
Nous venons de voyager de notre plein gré.